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Pensées et réflexions autour du féminisme, par Jade Boussert

LE FEMINISME ACTUEL SE DECREDIBILISE-T-IL ?


« Je ne suis pas féministe au sens de la revendication des femmes de vouloir démontrer qu’elles ont été les esclaves des hommes, je n’appréhende pas du tout le problème de cette façon », Simone Veil.


C’est cet actuel mouvement féministe (appelé le néoféminisme) parfois jugé trop exubérant dont participent des autrices comme Virginie Despentes, que certains jugent le féminisme d’extrême. Les autrices de l’ère néoféministe attaquent et provoquent, ce à quoi Veil rétorque qu’elle voit le problème d’un autre angle. De fait, plusieurs visions du féminisme peuvent se contredire : lorsque certains y voient le fait d’accabler l’homme, d’autres penchent sur la cherche d’égalité.


Mais ce qui est jugé de « féminisme de l’extrême » ou néoféministe n’est qu’un moyen d’expression, des idées partagées peut-être plus marginales, mais qui ne représentent pas les féministes dans leur totalité. Ces idées marginales sont souvent associées à des ouvrages portant sur le féminisme punk

de Despentes, qui brise les tabous et sort de la simple lutte des inégalités pour provoquer, choquer, et faire du bruit. Mais il faut rappeler, je crois, que le féminisme tel qu’il a été conçu visait à placer les femmes sur le même pied d’égalité que l’homme, d’abord dans la sphère publique, puis dans la sphère privée.


Il est dit, de la part d’anti-féministes, que les féministes d’aujourd’hui sont « trop agressives », qu’elles « détestent les hommes ». Même si cela est vrai pour le féminisme misandre (qui juge que la violence des hommes envers les femmes est omniprésente chez chacun d’eux : ce type de pensée pousse à détester l’homme, à l’exclure), l’exception ne confirme pas la règle. Les femmes seraient alors déchaînées et se voudraient supérieures à l’homme, pour recourir selon Wittig à un « séparatisme lesbien ». Elle ajoute d’ailleurs que « toutes les femmes doivent devenir lesbiennes, c’est-à-dire solidaires, résistantes et non collaboratrices ». Cette auto stigmatisation et ce mépris pour le sexe masculin, qui est finalement l’opposé de la misogynie, pourrait alors décrédibiliser les féministes modérées de mouvements tels que l’intersectionnalité des luttes (terme de Kimberlé Crenshaw) ou la société du Care. De fait, il en est de même avec certains homosexuels se disant décrédibilisés par les actions de la communauté lgbt+. Mais nous avons besoin de féministes, quelles qu’elles soient, extrêmes ou non, pour avoir le panel de toutes les actions possibles à envisager, aussi théoriques soient-elles. Un mouvement féministe ne doit pas en piétiner un autre et alors paraître comme le seul mouvement possible : il en est de même avec les partis politiques. Tous sont nécessaires au bon fonctionnement de la société, non seulement parce que cette pluralité confirme la liberté d’expression et d’opinion, et en plus parce que leur harmonie a pour but de refléter la société. C’est utopique, mais théorique : les mouvements sociaux tels que le féminisme fonctionnent sur les mêmes principes.


Aujourd’hui, 47% des français se disent féministes. Ce chiffre, pourtant que peu important à mon sens, effraie : ce sont 47% des français qui peuvent bouger l’ordre établi, le patriarcat de la société. Parce que les défenseurs des droits des femmes agissent, non pas pour donner un air anarchique au monde, mais pour rétablir une complémentarité entre les hommes et les femmes. La remise en question d’un mode de fonctionnement patriarcal installé depuis des siècles repousse, prend de la place, mais encore faut-il voir dans quel but. Accabler les hommes ou mettre les deux sexes à égalité ? Certains aspects du féminisme, aujourd’hui du moins, oscillent entre les deux visions et rendent suspicieux.


Les anti-féministes tiennent pour discours que les féministes prennent trop de place, que ce mouvement devient marginal et extrémiste. C’est cette vision-là qui est retenue du féminisme actuel. Le féminisme devient marginalisé : et s’il y a bien un parti qui est censé prendre sous son aile les stigmatisés, c’est le parti socialiste, d’où son étymologie. Ce sont donc les partis de droite, naturellement, qui récupèreront ceux qui ne se sentent pas féministes, de plus en plus nombreux de par la marginalisation de ce mouvement féministe à vocation réformateur. Il y a donc une mutation de l’électorat du moins féminin, puisque les propositions des partis socialistes et de gauche ne répondent plus à leurs attentes, alors qu’ils devraient, comme la tradition l’imposerait, soutenir la minorité.


Malgré cela, je crois que le machisme a néanmoins fait plus de morts que le féminisme. Redorer la vision du féminisme est donc une urgence, et par féminisme j’entends ici les droits des femmes, récemment bafoués dans des pays qui ne sont que peu éloignées du nôtre. Ici n’est ni ma place, ni l’endroit pour tenir un discours moralisateur. Mais le féminisme devient marginalisé, et plus aussi important qu’il ne doit l’être dans le monde.


POURQUOI LES FEMMES ONT-ELLES MIS TANT DE TEMPS A TROUVER LEUR PLACE DANS LA SOCIETE ?


La misogynie possède un fondement culturel : ce sont notamment 2 récits des origines qui représentent la femme comme responsable de tous les maux sur Terre. C’est la Genèse qui montre qu’Eve a corrompu Adam, en l’incitant à manger un fruit de l’arbre de la connaissance. C’est alors celle par qui le scandale arrive, comme dans la mythologie grecque avec Pandore qui sème le trouble en succombant à la tentation d’ouvrir la boîte de Pandore qui fait s’échapper tous les malheurs desquels l’homme souffre aujourd’hui. La femme a donc toujours paru comme source de tous les désordres : la femme doit alors se taire, se prostrer à la maison, à l’écart des hommes.


Comment la femme peut-elle alors se trouver une place dans une culture qui la rejette ? La notion de femme a été construite par la société et sa culture : les mythes ont en effet participé à une lecture misogyne : l’homme passe pour actif, la femme pour passive. Ce n’est qu’au XIXe siècle, lors de la réaction des femmes au Code de 1804 que la première vague féministe voit le jour. Pendant plus de 150 ans les femmes se battront donc pour l’égalité entre les hommes et les femmes dans la sphère publique (avec notamment le droit de vote). Les femmes veulent acquérir des droits, et après ces années de lutte, rien ne distinguera plus les hommes et les femmes, du moins sur le papier. Socialement, les femmes ne jouissent pas des mêmes prérogatives pour autant.


Son émancipation dans la sphère privée n’adviendra qu’après les années 60, où la question du corps est largement posée et suscite des débats. En 1967, la loi Neurwith autorise la contraception afin de réguler les naissances. Année après année, la femme possède de plus en plus de droits sur son corps. C’est en suivant ce modèle que pour abolir les avortements clandestins de masse, Simone Veil fait voter la loi autorisant l’IVG en 1975. De nombreux ouvrages tels que L’évènement d’Annie Ernaux relatent l’atrocité et les risques de ces avortements illégaux, pouvant provoquer stérilité ou hémorragies internes qui conduisent à la mort. Certaines femmes ont dû recourir à des avortements traumatisants en risquant leur vie pour que leur voix soit écoutée, pour que le gouvernement (d’abord à des fins politiques) leur cède ce droit. Car la majorité des députés n’ont pas voté cette loi

en faveur des droits des femmes, mais pour supprimer cette pression politique qu’induisaient les avortements clandestins. La France prenait un tournant anarchique, le bruit courrait d’une catastrophe sanitaire.


Jade Boussert

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